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Abbaye de Liessies (Nord)

Documents, photos et liens concernant l'Abbaye de Liessies depuis sa création, à nos jours en passant par sa destruction à la Révolution

Les derniers religieux de Liessies (à la révolution), le 9 aout 1790

Publié le 29 Septembre 2019 par B Desmarescaux

L'Abbaye de Liessies  est supprimée par la loi du 12 juillet 1790 et les décrets des 23 octobre et 5 novembre 1790. Elle sera vendue en 1791.

La liste des derniers religieux de Liessies a été fournie aux membres du District d'Avesnes le 9 août 1790 , comme suit :

(19 moines parmi l'abbé Dom Marc Verdier, âgé de 55 ans, plus 6 frères. Le plus jeune des moines, Etton Larivière, avait 30 ans, le plus jeune des frères André Demanet *, 24 ans)

1 - Dom Marc Verdier, abbé, âgé de 55 ans

2 - Dom Ildephonse Deharchier, prieur, âgé de 60 ans.

3 - Dom Joseph Gilles, procureur, âgé de 64 ans

4 - Dom Ambroise Watteau, maître d'hôtel,âgé de 53 ans

5 - Dom Anselme Briet, sous procureur, âgé de 49 ans 

6 - Dom Célestin Macquart, sous prieur, 49 ans.

7 - Dom Jean Monnier, 47 ans

8 - Dom Agapit de Beaume, 48 ans

9 - Dom Jérome Becquet, professeur de théologie, 46 ans

10 - Dom Romain Henin, 1/3 procureur, 45 ans

11 - Dom Jacques Oudart, 46 ans

12 - Dom Benoit Brûlé, trésorier, 43 ans

13 - Dom Michel Elise, bibliothécaire, 38 ans

14 - Dom Grégoire Carion, chantre, 34 ans 

15 - Dom François Dimont, sacristain, 32 ans

16 - Dom Augustin Delesalle, maître de bassecour, âgé de 33 ans

17 - Dom Charles Bouchart, 34 ans

18 - Dom Thomas Leloir, 30 ans

19 - Dom Etton Larivière, 30 ans

20 - Frère Lambert Bécart, diacre, 26 ans

21 - Frère Louis Tupigny, sous diacre, 25 ans

22 - Frère Humbert Hautecoeur, 2§ ans

23 - Frère Maur Facq, 35 ans

24 - Frère André Demanet, affilié, 24 ans

25 - Frère Nicolas Lévêque, 45 ans

26 - Dom René Schohem, détenu à Armentières à cause de sa démence, 78 ans

 

 

* D Demanet (André-Joseph), né à Leernes le 16 février 1767, bénédictin de Liessies, émigré en son lieu natal.

  • LES RELIGIEUX DE L'AVESNOIS PENDANT LA RÉSOLUTION

    L'inventaire du Prieuré de Dompierre (26 Avril 1790)

    Nous avons jadis donné à la Société qui a bien voulu, en son temps, l'insérer au Tome XIV de ses Mémoires une notice -sur le dernier bénédictin du prieuré de Dompierre. Nous voudrions aujourd'hui publier in-extenso le procèsverbal de l'inventaire du même prieuré, tel qu'il nous est conservé aux Archives Nationales en F 19 610. Voici ce document.

    L'an mil sept cent quatre vingt dix le vingt-six du mois d'avril, Nous maire et officiers municipaux de la communauté de Dompierre, terre d'Avesnes, en Hainaut, canton de Dourlers, sous signés en vertu des lettres patentes du Roi sur un décret de l'Assemblée Nationale concernant les religieux, données à Paris le 26 mars 1790,

    Nous nous sommes transportés au prioré de Dompierre auquel il se trouve un religieux dépendant de l'abbaie de Liessies pour faire l'inventaire des meubles, effets, titres et papiers concernant les revenus et aigent que peut avoir

    i°) dans l'église dudit prioré nous y avons trouvé savoir un calice en argent doré, une boîte en argent aux saintes huiles, des chasupes communes pour célébrer la messe,

    2°) vingt sept assiettes d'étins,

    30) treize plats d'étins,

    4°) trois plats d'étins,

    5°) trois petites terrines d'étins,

    6°) une horloge,

    7°) une casseroles de fer blanc,

    8°) deux cafetières et un bassin aussi de fer blanc,

    90) un tournebroche, 10°) six casserolles de cuivre, ii°) trois poilons de cuivre, 12°) une poissonnerie de cuivre, 13°) six pots de nuit d'étins, 14°) une marmite de cuivre,


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    15°) un chaudron de cuivre, 16°) trente sept assiettes de falliance, 17°) deux terrines de f alliance, i8°) douze chaises,

    19°) une bibliotèque contenant cent volumes environ lui servant pour la piété, 20°) une garde robb, _ 2i°) neuf napes,

    22°) quatre douzaines de serviettes, 23°) trois lits de maître, 24°) quatre lits de domestiques, 250) deux paires de draps. Dom Placide Hoing âgé de soixante ans, il nous a déclaré que son attention étoit de rester à la maison où il a prononcé ses voeux,

    Nous a déclaré n'avoir que cent vingt livres d'argent monnoie pour le service de la maison. Pour les vesailles en argent il a déclaré les avoir renvoyé à l'abbaïe de Liessies.

    Fait et arrêté par nous maire et officiers municipaux dudit Dompierre ledit jour que dessus. F. J. Gilliard maire

    Henry Bocquet Philippe Joseph Gomez

    Jacques Joseph Carion François Joseph Druart __ Jean Charles Petithomme

    Bonnaire, fils, procureur de la commune.

    De cet inventaire dont nous avons, comme il convient, respecté scrupuleusement les termes et l'orthographe de ceuxci, laissant, par exemple, le mot attention qu'une distraction certaine a fait écrire à la place du mot intention, il semble ressortir que le prieuré de Dompierre n'était pas, somme toute, une demeure trop luxueusement meublée. On aurait aimé savoir avec exactitude quels livres contenait la bibliothèque de Dom Placide, mais il faut se contenter de l'indication générale : « volumes.... servant pour la piété.» Ce document nous donne, et en ceci encore il est intéressant, le nom du maire et des officiers municipaux de Dompierre en avril 1790.

    Nous relèverons seulement un de ces noms, celui de Bonnaire pour faire observer qu'il s'agit d'Isidore Bonnaire (1754-1835) dont nous avons eu occasion de parler déjà en d'autres études et qui avait à cette époque quatre frères religieux et prêtres : Louis (1756-1821) ; Célestin-Constant (1763-1819) ; Maximilien-Joseph (1765-1835) et Jean-Baptiste (1767-après 1816).


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    Les derniers religieux de l'Abbaye de Liessies

    Au tome XIII des Mémoires de la Société Archéologique et Historique de l'arrondissement d'Avesnes (p. 83 et suiv.), nous avons donné des notices biographiques relatives à treize d'entre les vingt-six derniers religieux de l'abbaye bénédictine de Liessies. Nous voudrions ici, après avoir complété deux de ces notices, celles qui ont trait à Dom Charles Bouchart et au Frère Louis Tupigny, indiquer ce qu'il nous a été possible de découvrir au sujet des treize moines de l'abbaye dont nous n'avons pas parlé jusqu'ici, afin que de la sorte les Mémoires de la Société possèdent sur les derniers religieux de Liessies une étude aussi complète que possible et qui n'avait jamais été tentée jusqu'à ce jour.

    I ) — Complément d'information au sujet de Dom Charles Bouchart et de Frère Louis Tupigny. -

    A) DOM CHARLES BOUCHART : Nous avons dit (cf. Tome XIII p. 85) qu' « il devint le 4 octobre 1791 curé constitutionnel de Beaucamps ». Plus précisément, le 25 juillet 1791, Bouchart qui s'était fixé au district de Lille depuis le 3 juin précédent, fut choisi comme vicaire par Lecerf, curé constitutionnel de Santés. Ce Lecerf, originaire de Maing, comme Bouchart, et un peu plus ''jeune que lui, puisqu'il était né le 14 août 1758, appartenait au couvent des bernardins de Loos. Après son abdication de la cure de Santés, il se mariera, demandera et obtiendra après le Concordat convalidation de son union (voir AF IV, 1909), puis mourra nonagénaire au hameau du marais de Lomme, le 12 novembre 1848. Bouchart ne demeura que fort peu de temps le vicaire de Lecerf à Santés, puisqu'au début d'octobre 1791 il était élu à la cure de Beaucamps et Englos où'il fut installé le 17 du même mois.

    — Nous avons dit d'autre part (Tome XIII, p. 85) que Bouchart « mourut à Maing après avoir reçu en 1816 l'absolution de son apostasie du pape Pie VII ». En fait, c'est seulement le 1" janvier 1837 qu'il mourut à Maing, âgé de 80 ans et huit mois ; et quant à son absolution ce n'est pas en 1816 mais en 181 o qu'il la demanda et l'obtint,


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    ainsi qu'il ressort des dossiers Caprara, AF IV, 1910. Nous trouvons en cet endroit avec la supplique de Bouchart la lettre qu'y joignit à la date du 14 juin 1810, Jean-Baptiste Joly, ex-curé assermenté de Paillencourt, devenu après le Concordat curé de Maing et Monchaux. Voici le texte intégral de ces deux documents, la supplique de l'ex-bénédictin d'abord, puis la lettre du curé Joly, tels qu'on les peut lire en AF IV, 1910.

    a) Supplique de Dom Charles Bouchart.

    J. Chrisistome Bouchart, cultivateur à Mainglez-Valenciennes à Son Eminence Monseigneur le cardinal Caprara, légat du St Siège

    à Paris, Monseigneur

    Vous expose avec la plus parfaite soumission J. Chrisostome Bouchart ex-religieux bénédictin prêtre profès de la ci-devant abbaye de Liessies du diocèse de Cambray département du Nord disant que le onze germinal an trois il aurait contracté mariage civilement avec Françoise Fauvart fille majeure et de condition libre, que le pétitionnaire aveuglé par des maximes pernicieuses et séduit par les conseils d'une faction impie propagés pendant une révolution sans exemple, reconnoit avoir tenté cette démarche non seulement au grand scandale des vrais fidèles mais aussi au mépris des loix de la Sainte Eglise catholique, apostolique et romaine (en haine de laquelle il se voioit persécuté et proscrit) dans ls sein de laquelle cependant il a toujours désiré et désire vivre et mourir, ayant fait baptiser cinq enfants qu'il a eus de cette union, que ledit pétitionnaire reconnoit en outre avoir contracté cette union au mépris des voeux solennels qu'il a prononcés et se confesse coupable envers Dieu et la Sainte Eglise et désirent depuis longtemps en obtenir le pardon demande avec insistance l'absolution des censures qu'il a pu encourir et en outre la grâce de pouvoir contracter mariage en face de l'église avec Françoise Fauvart.

    C'est pourquoi le pétitionnaire a son très humble recours vers vous, Monseigneur, à ce qu'il vous plaise d'accueillir favorablement sa demande et de lui faciliter les moyens de rentrer dans le giron de la Sainte Eglise catholique, apostolique et romaine.

    Quoi faisant, etc. (sic).

    signé : J. C. BOUCHART.

    b) Lettre du curé Joly (elle se trouve à l'intérieur de la supplique formant chemise) :


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    A Maing, le quatorze de juin 1810.

    Jean-Baptiste Joly, desservant de l'église succursale de Maing et Mondiaux, diocèse de Cambrai, à Son Eminence Monseigneur le Cardinal Caprara légat du Saint Siège à Paris Monseigneur,

    Permettez-moi, s'il vous plait, de joindre mes très humbles supplications à celles d'un frère malheureux que le Seigneur a abandonné dans sa colère mais que dans sa miséricorde il parait daigner ressaisir et remettre au nombre de ses enfants.

    Jean Chrisostome Bouchart a erré, il est vrai, mais sa conduite me fait entrevoir et espérer un sincère retour. Vous représentez le père commun de tous les fidèles qui représente lui-même le père de toute miséricorde. C'est par la tendresse paternelle de Notre Saint Père le pape Pie VII, c'est par les entrailles sacrées de Notre Divin Maître que je vous conjure de jetter des yeux propices sur une de mes brebis égarées. Je ne vous demande pas de lui rendre comme à l'enfant prodigue sa première robe, cela est impossible, mais au moins de le faire rentrer dans le sein de l'église en lui accordant l'absolution des censures dont il est chargé et la grâce de recevoir le sacrement de mariage avec Françoise Fauvart de laquelle il a plusieurs enfants.

    Monseigneur, celui pour lequel j'intercède, touché de votre bienfaisance versera des larmes de pénitence jusqu'aux derniers soupirs de sa vie et vous paiera le tribut de sa plus sincère reconnoissance en priant le Seigneur pour la conservation de vos précieux jours.

    Je suis avec un très profond respect de Votre Eminence, Monseigneur, le très humble, très soumis et très dévoué serviteur

    J. B. JOLY desservant de Maing et Mondiaux chez Buttot apoticaire rue de Cambron à Valenciennes.

    B) FRÈRE LOUIS TUPIGNY. — Aux renseignements apportés au Tome XIII des Mémoires de la Société, p. 85, qu'il soit permis d'ajouter les quelques détails suivants. LouisZacharie Tupigny naquit au Nouvion-en-Thiérache le 20 septembre 1767. Il fut ordonné sous-diacre à Cambrai le 5 juin 1789, et diacre le 17 novembre 1791. Il se retira ensuite un moment au Nouvion, puis fut ordonné prêtre à Mons le 24 mars 1792. 11 semble bien qu'à partir de cette époque et jusqu'après le Concordat, il vécut hors de France.


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    Avant de devenir en 1813 curé de Bohain, puis en 1814 doyen de Vervins où il mourut le 19 octobre 1843, il avait desservi pendant quelques années un petit village de l'Aisne qui porte son nom : Tupigny. — Il nous semble bien qu'avec Louis-Zacharie Tupigny disparut en 1843 le dernier survivant des vingt-six religieux que Liessies comptait à la fin de 1790. Lui-même était au début de la Révolution le benjamin de l'abbaye.

    II): Religieux dont il n'a pas été parlé au Tome XIII.

    Les voici en suivant l'ordre alphabétique et en réunissant pour chacun les renseignements biographiques qu'il nous a été possible de recueillir.

    1) DOM ANSELME BRIET. — Né le 12 mai 1739, Dom Briet était au début de la Révolution sous-procureur du monastère. A sa sortie de Liessies, il se rendit un moment à la maison de retraite de Vicoigne, puis bientôt émigra à Piéton (Belgique). Là sa trace se perd.

    2) DOM BENOIT BRÛLEZ. — Pierre-Joseph Brûlez, en religion Dom 'Benoît, naquit à Nivelles-en-Brabant le 20 décembre 1747. Entré de bonne heure à l'abbaye de Liessies, il fut ordonné sous-diacre le 28 mai 1774 et diacre le 10 juin 1775. Ces deux ordres lui furent conférés par Mgr d'Aigneville de Millancourt, évêque titulaire d'Amyclès. Le 24 mai 1777, Dom Benoît était ordonné prêtre « en l'église du monastère Saint-Aubert à Cambrai, par" Mgr de Fleury, archevêque de Cambrai. — Signalé en juillet 1791 au district d'Avesnes comme ayant enlevé de l'abbaye dont il était trésorier « des argenteries, linges et ornements appartenant à la nation, qu'il faisait transporter à l'étranger », il fut de ce chef dénoncé à l'accusateur public d'Avesnes, mais nous ignorons quelle suite fut donnée à l'affaire. Il semble bien que dans la seconde moitié de 1791 ou dans le courant de 1792, Dom Brûlez regagna la Belgique et sa ville natale de Nivelles. Il parait probable que c'est en celle-ci qu'il fut arrêté en novembre 1798 pour être envoyé à l'île de Ré où il dut arriver le 17 janvier 1799. Après Manseau auquel il se réfère, après Thys et d'autres encore, François Rousseau {cf. Moines bénédictins martyrs et confesseurs de la foi pendant la Révolution, page 300) déclare que Dom Brûlez mourut à l'hôpital de l'île de Ré le 15 septembre 1799.


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    3) DOM GRÉGOIRE CARION. — Eloi Carion, en religion Dom Grégoire, « chantre » de l'abbaye était né à Ath le 27 février 1756. C'est là qu'il se retira à sa sortie de Liessies où il était entré en 1777, et là aussi qu'il mourut le 31 octobre 1814.

    4) DOM MICHEL ELIS. — Nicolas-Joseph Elis (et non Elio, comme écrit Vos ou Elise, comme écrit Gossart), en religion Dom Michel, était né à Froidchapelle (Belgique) le 28 août 1752, de Jean-Etienne Elis et de Marie-Marguerite Cosse qui s'étaient mariés le 19 avril 1751 (cf. registres de Froidchapelle, années 1751 et 1752). On le trouve en 1790 bibliothécaire de l'abbaye de Liessies. Elu en juin 1791 curé constitutionnel de Solrinnes, il refusa aussitôt ce poste et à quelque temps de là émigra en Belgique à Piéton. On le trouve à Thuin de mai ou juin 1792 au 10 mai 1794, date à laquelle les troupes françaises victorieuses pénétrèrent en cette localité. Peut-être alors revint-il à Froidchapelle ; mais ce qui est certain c'est qu'il fut arrêté en pluviôse an 6 comme prévenu d'émigration et bientôt après transféré à la prison des Ecossais à Douai, l'administration de Jemmapes l'ayant renvoyé au département du Nord. Elis ne put sortir de la maison d'arrêt des Ecossais que le 22 frimaire an 8, date à laquelle le Commissaire du département l'autorisa à vivre chez Scourgeon, aubergiste à Douai. — Les Archives départementales du Nord contiennent un volumineux dossier sur la captivité d'Elis et les démarches qu'il fit en vue de sa libération (cf. L. 1167). A plusieurs reprises l'ex-religieux laisse clairement entendre qu'il était à la veille de se marier et de prendre un état ; et il argue de cela pour obtenir sa mise en liberté. — Qu'en était-il au juste ? Ici les dossiers Caprara viennent compléter les données des archives du Nord et nous apprennent qu'en fait le 1" décembre 1799 Elis épousa à Douai RosalieEmèse Scourgeon la fille de l'aubergiste signalé plus haut.— Après le Concordat en effet, Elis demeurant à Douai et y exerçant la profession d'instituteur sollicita du cardinal Caprara la convalidation du mariage qu'il déclare expressément avoir contracté. — Les dossiers Caprara (voir AF IV, 1907) renferment deux suppliques d'Elis, l'une en date du 28 avril, l'autre en date du 1" juin 1803. Bien qu'elles aient entre elles, et cela se comprend, de très grands points de contact, on nous permettra d'en reproduire 1 ici le texte tel qu'on le lit en AF IV, 1907.


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    A) Première supplique d'Elis :

    Douai, le 28 avril 1803. A Son Eminence Monseigneur Caprara légat du Saint Siège à Paris. Monseigneur,

    Vous expose avec la plus parfaite soumission Nicolas-Joseph Elis ex-reljgieux prêtre bénédictin de la ci-devant abbaye de St Lambert de Liessies du diocèse de Cambray, département du Nord, aujourd'hui instituteur en la ville de Douay, même département, disant

    Que le 1" décembre 1799 il aurait contracté mariage par devant la municipalité de la dite ville avec Rosalie Emèse Scourgeons, fille majeure et de condition libre,

    Que le dit Elis a fait cette démarche non par mépris de la religion catholique, apostolique et romaine dans la commu- 1 nion de laquelle il a toujours désiré vivre et mourir, dans laquelle il élève trois enfants issus de ce mariage et qu'il a fait baptiser.

    ■ Qu'il ne l'a pas fait par libertinage, mais parce que se voyant avili, persécuté, confondu dans les prisons avec les scélérats,,traduit devant les tribunaux en haine ds la religion et de ses ministres, espérant par là accélérer sa liberté qui lui fut effectivement rendue huit jours après,

    Enfin qu'il n'a pas contracté ce mariage au mépris des voeux qu'ils a prononcés dans la dite abbaye de Liessies, vu qu'après avoir mûrement réfléchi, il s'est persuadé qu'ils étaient nuls n'ayant pas été émis avec les dispositions prescrites par l'article 3 de redit du roi de 1768 concernant les ordres religieux, etc., etc.,

    En conséquence ledit Elis, ayant contracté mariage civilement, désire de concert avec son épouse de recevoir la bénédiction nuptiale de son pasteur, s'il vous plaisoit de l'authoriser à cet effet,

    C'est pourquoi il a son très humble recours vers Votre Eminence à ce qu'il vous plaise, Monseigneur, accueillir favorablement sa demande ; il ne cessera de former des voeux ainsi que sa famille pour l'exaltation de la religion catholique, apostolique et romaine et pour votre conservation.

    N. J. ELIS Instituteur, rue du grand Cauteleux à Douay, n° 186.

    — En marge de cette supplique Elis avait écrit : « En témoignage de quoi, le suppliant joint un certificat de bonne vie et moeurs à lui délivré par ses voisins. » •— Le certificat


    — 126 -

    dont s'agit est en fait joint à la supplique. Il porte la signature de dix personnes, et il est daté du 12 floréal an 11 (2 mai 1803). Les signatures sont légalisées par la mairie de Douai, à la date du 14 floréal.

    B) Deuxième supplique d'Elis :

    Douay, le icr juin 1803.

    Nicolas Joseph Elis Instituteur à Douay département du Nord à Son Eminence Monseigneur Caprara légat du Saint Siège à Paris. Monseigneur,

    Vous expose avec la plus parfaite soumission Nicolas Joseph Elis, ex religieux prêtre bénédictin de la ci-devant abbaye de Liessies du diocèse de Cambray, département du Nord, aujourd'hui instituteur en la ville de Douay, même département, disant

    Que le 101 décembre 1799 il aurait contracté mariage par devant la municipalité de la dite ville avec Rosalie Emèse Scourgeons, fille majeure et de condition libre,

    Que ledit Elis aveuglé et enti aîné ou séduit par les maximes pernicieuses d'une faction impie et subersive de tout ordre, propagées pendant une révolution sans exemple, reconnoit avoir fait cette démarche non seulement au grand scandale des vrais fidèles, mais aussi au mépris des lois de la Sainte Eglise catholique, apostolique et romaine, en haine de laquelle il se voyait persécuté et confondu dans les prisons avec les scélérats et traduit devant les tribunaux, dans le sein de laquelle cependant il a toujours désiré et désire vivre et mourir, en témoignage de quoi il a fait baptiser les trois enfants issus de ce mariage,

    Que le suppliant reconnoit en outre avoir osé contracter ce mariage au mépris des voeux qu'il avait prononcés dans la dite abbaye de Liessies s'étant faussement persuadé qu'ils étaient nuls n'ayant pas été émis avec les dispositions requises par l'article 3 de l'édit du roy de 1768.

    De tout ce que dessus le dit Elis se reconnoit coupable envers Dieu et la Sainte Eglise, désire et demande avec insistance d'en obtenir le pardon, en même tems l'absolution des censures qu'il a pu encourir et en outre la grâce de pouvoir contracter mariage en face de l'Eglise avec Rosalie-Emèse Scourgeons. C'est pourquoi le suppliant a son très humble recours vers Son Eminence à ce qu'il lui plaise d'accueillir favorablement sa demande et de lui faciliter les moyens de


    127rentrer

    127rentrer le giron de la Sainte Eglise catholique, apostolique et romaine.

    N. J. ELIS instituteur rue du grand Cauteleux à Douay.

    — Cette seconde supplique fut transmise à la nonciature par M. Lelièvre, curé de St Pierre à Douai qui y joignit la lettre suivante portant la date du 26 prairial an 11 (15 juin 1803) et conservée elle aussi en AF IV, 1907.

    Monseigneur.

    J'ai l'honneur d'adiesser à Votre Eminence la très humble supplique de Nicolas Joseph Elis et de Rosalie Emèse Scourgeons, mes paroissiens. Les faits contenus dans cette supplique sont de la plus exacte vérité. Je crois pouvoir également assurer Votre Eminence de la sincérité du repentir de l'orateur et de son épouse. D'ailleurs j'ai la certitude que cet instituteur instruit ses élèves dans les principes de la religion catholique. Je la supplie donc d'être favorable à la demande et de joindre à la dispense la permission de leur donner la bénédiction nuptiale in aedibus privatis et sans proclamation d'annonce ainsi que dans pareil cas vous me l'avez accordé pour le citoyen Perrin.

    Je me prosterne aux pieds de Son Eminence et la supplie de m'accorder sa sainte bénédiction.

    LELIÈVRE curé de la paroisse St Pierre.

    — La requête d'Elis obtint favorable accueil et il fut répondu ainsi au curé de St Pierre : « J'ai-acquiescé bien » promptement à la supplique de Nicolas-Joseph Elis et de » Rosalie-Emèse Scourgeons. Le témoignage favorable que » vous rendez à leur conduite me porte à croire qu'ils se » rendront dignes de l'indulgence extraordinaire du St Siège » et qu'ils en profiteront pour le salut de leur âme et pour » l'édification publique. Vous verrez que mon décret porte » qu'on ne doit pas permettre aucune solennité à la célébra» tion du mariage des pétitionnaires. Par conséquent la » publication des bans ne peut avoir lieu, mais je ne vois » pas quel inconvénient il y aurait à se rendre à l'église et » si vous persistez dans l'idée de préférer une maison par» ticulière vous en demanderez la permission à l'évêque ou » à un de ses grands vicaires...»

    — La régularisation du mariage d'Elis se trouve consignée dans les registres paroissiaux de St Pierre à Douai, à


    — 12S -

    la date du 27 octobre 1803. L'ex-religieux fut reçu ce jour-là à la bénédiction nuptiale par le ' curé Lelièvre, assisté comme témoins par François-Joseph Du Brulle, prêtre, et François Mareu. Les lettres du cardinal Caprara et de Mgr Belmas, évêque de Cambrai, comme aussi l'attestation du mariage religieux, sont insérées en latin, en sept grandes pages du registre paroissial.

    A partir de cette époque, nous perdons la trace de Nicolas-Joseph Elis, car, des recherches faites, il parait bien résulter qu'il n'acheva pas son existence à Douai ; et nous ignorons où il vint terminer sa carrière.

    50) FRÈRE MAUR FACQ. — Jacques-Pierre-Joseph Facq, en religion Frère Maur, était né à Landas le 22 avril 1765. Il n'était pas encore sous-diacre en 1790. Il le devint à Mons le 17 décembre 1791 et fut ordonné diacre en cette même ville le 25 mars 1793. Il était revenu depuis quelque temps déjà, semble-t-il, dans sa famille à Landas, quand il y fut arrêté en thermidor an VI, pour être transféré, d'abord à la maison d'arrêt d'Orchies, puis, le 10 fructidor, à la prison des Ecossais de Douai où il devait rester jus- . qu'en frimaire an VIII. Des démarches pourtant avaient été tentées en sa faveur dès le moment même de son arrestation. Des citoyens de Landas affirmèrent qu'il n'était pas prêtre et que de plus « il faisait des voeux tous les jours pour la prospération (sic) de la République ». On •ajouta qu'il avait un frère en Italie et qu'il était lui-même bon patriote, encore que peut-être d'intelligence faible. Mais tous ces efforts n'obtinrent aucun résultat.

    Après le Concordat, Frère Maur Facq songea un moment à entrer au Séminaire de Cambrai, mais finalement n'y parut pas. C'est du moins ce qu'indique l'abbé Dehaut dans son Histoire du grand Séminaire de Cambrai (cf. p. 18 et 19 ; p. 34 et 35). Sans doute, en ces "endroits, l'auteur ne nomme pas expressément Facq, mais il le désigne d'une manière assez claire pour qu'aucun doute ne soit possible. Ajoutons que l'abbé Dehaut, historien consciencieux, appuyait ses affirmations sur de vieilles notes et d'anciens registres alors existant à l'archevêché de Cambrai mais qui ont disparu au cours de la guerre de 1914-1918.

    En fin de compte Facq demeura à Landas. Il finit par s'unir civilement à Catherine Pasbecq et eut plusieurs enfants. II mourut à Landas le 31 mars 1841, âgé de près


    12Ô

    de 76 ans. Son acte de décès le dit « instituteur primaire ». Nous savons par ailleurs (cf. registres paroissiaux de Landas) qu'il fut inhumé par le curé au cimetière de Landas, ce qui indique qu'il avait fait régulariser sa situation au regard de l'Eglise. Catherine Pasbecq 'lui survécut quelques années.

    - 6°) DOM JOSEPH GILLES. — Né le 8 octobre 1725, Dom Gilles était en 1790 le procureur de l'abbaye. Il mourut subitement au monastère de Liessies le 18 avril 1791.

    70) DOM ROMAIN HENIN. — Né le 15 août 1746, tiersprocureur du monastère, Dom Romain à sa sortie de l'abbaye manifesta l'intention de se retirer à Avesnes ; mais nous ignorons ce qu'il devint par la suite.

    8°) DOM THOMAS LELOIR. — Jean-Louis Leloir était né à Thirimont (Flainaut) le 26 octobre 1760. Après la fermeture de son abbaye il se retira à Berzée (diocèse de Namur) puis fut incorporé au diocèse de Tournai où il fut nommé curé de Thuillies (Hainaut) en 1816, et où il mourut le 15 juin 1825.

    90) FRÈRE NICOLAS LÉVÊQUE. — C'était un frère lai de l'abbaye. Il n'avait par conséquent reçu en 1790 et ne devait recevoir par la suite aucun ordre. Ce que nous savons de lui se borne à ceci : il était né le 1" mars 1746. Il vivait encore en l'an 8 et se trouvait à cette époque dans la région de Barbençon (Belgique). En germinal an 8 on le voit demander une pension en qualité d'ancien frère lai de l'abbaye de Liessies. Nous ignorons quelle suite fut accordée à sa requête et ce qu'il advint de lui après cette époque.

    io°) DOM CÉLESTIN MACQUART. •— Louis-Joachim Macquart, en religion Dom Célestin, sous-prieur de Liessies, était né à Méricourt, aujourd'hui département du Pas-deCalais, le 17 octobre 1741. A sa sortie de l'abbaye, il se retira d'abord à Méricourt, puis émigra en Belgique. Revenu à Méricourt après la Révolution, il y mourut le 23 octobre 1813.

    II°) DOM JEAN MONNIER. — Jean-Baptiste Monnier naquit à La Hamaide le 4 août 1744. Il fit ses cours d'hu-


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    manité à Ath et ceux de philosophie à Douai. Entré à Liessies sous le nom de Dom Jean, ordonné prêtre à Cambrai par Mgr d'Aigueville, le 8 décembre 1773, il fut pendant onze ans procureur du monastère de Liessies. Expulsé de la partie française du diocèse de Cambrai, il revint dans la partie autrichienne de celui-ci. Après 1799 on le trouve tantôt à Brugelette, au couvent des Soeurs grises, tantôt à Ath. Il mourut dans sa famille à Brugelette le 21 novembre 1817.

    120) DOM JACQUES OUDART. — Né le 2 mai 1745, Dom Oudart à sa sortie de Liessies se retira un moment à Avesnes. Nous ignorons ce qu'il devint par la suite, c'est-à-dire après 1791.

    130) DOM PIERRE SCOHEM. — Bruno-Joseph Scohem, né le 21 novembre 1717, avait fait profession à Liessies le 8 septembre 1738, sous le nom de Dom Pierre. Il était en 1790 détenu aux Bons fils à Armentières pour démence. Il mourut à Armentières le 2 pluviôse an 3 (21 janvier 1795), ainsi qu'il appert des registres de décès de la ville d'Armentières.

    En résumé, quatre des derniers bénédictins de Liessies moururent pendant la Réyolution : Dom Brûlez, à l'Ile de Ré ; Dom Gilles, dans son monastère ; Dom Etton Larivière, sur Féchafaud à Valenciennes et Dom Scohem à Armentières. — Parmi ceux qui survécurent certainement à l'époque révolutionnaire sept moururent dans le diocèse de Tournai, six dans celui de Cambrai, un dans celui d'Arras, un enfin dans celui de Soissons. Plusieurs de ces quinze religieux exercèrent là où ils se trouvaient un ministère actif après le Concordat. — Trois enfin abandonnèrent l'état ecclésiastique pour se marier : Dom Bouchart, Dom Elis et Frère Facq. — Il reste trois religieux dont nous n'avons pu suivre la trace après 1791 : Briet, Henin et Oudart ; et quant à l'unique frère lai de l'abbaye, Nicolas Levêque, sans doute acheva-t-il sa carrière dans la région de Barbençon après 1800.

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